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Dépèches du Tarn et Saone
15 novembre 2009

« La fenêtre de la maison des Boulard ! »

 

(Retranscrit de l'émission sous les étoiles exactement du 6 Novembre 2009 de Serge Le Vaillant)

Sûr ! C’est sûr ! Sûr que ça va faire scandale au pays !

scandale

Sûr qu’on n’a pas fini d’en parler ! Et déjà, on en cause au petit bar de l’Escale en haut de la côte du Paradis.

comptoir

On n’est pas bien sûr encore ! On attend des informations. Dès que le brigadier Bérecq viendra prendre son blanc sec, celui de 11 heures, on en saura plus, on l’espère !

inspecteur

On l’attend le brigadier ! Impatiemment ! On les a vus tous entrer dans la gendarmerie ! Donc, et ben oui ! C’est pas pour des prunes ! La mère Pilorget va porter plainte ! C’est courageux ! Parce que forcément, si la petite a menti, si elle a inventé, si elle a imaginé, la mère Pilorget va se retrouver avec toute la communauté de communes à dos ! Y en a un au comptoir qui demande si y a eu des attouchements ! Une voix répond :

« Oh ! Sûrement ! Sûrement ! »

Et on continue de guetter le brigadier. 11H07, il est en retard pour son blanc sec, c’est pas dans ses habitudes ! Oh ! Y reste jamais longtemps ! Service-service ! Jugulaire ! Le temps de s’en coller deux derrière la cravate, deux que le patron, l’Olivier, lui sert frais, dès qu’il l’aperçoit, pour gagner du temps.

blanc

Bon… Où j’en étais ? Ah ! Oui ! Donc, la mère Pilorget ! Thérèse ! Une revêche, une pimbêche ! Elle est entrée à la gendarmerie une heure plus tôt, avec sa fille Josy, Josiane pour l’état-civil. 10 ans. Y avait avec elles la petite Nathalie, la fille au Crémier ! Donc, elles étaient trois ! Ben oui ! Trois ! Elles sont trois devant le bureau du brigadier-chef.


La mère Pilorget veut déposer plainte !

pilorget

Maintenant, elle, elle a rien vu, rien entendu ! Ce sont les petites qui savent ! Alors, elle les pousse à raconter ! Oui ! Comme hier ! Dans la cuisine ! Toute la nuit, blanche, à retourner l’oreiller pour essayer de comprendre, pour passer dans le détail tout ce qu’elle avait entendu ! Mais… Des horreurs ! Elle n’a même pas osé en parler à son mari ! Ah ! Ben ! Il aurait fait justice lui-même vu qu’il est chasseur ! Non ! Elle a préféré que ça se règle dans le calme et la sérénité ! Et maintenant, dans le bureau, c’est aux petites de raconter, comme dans la cuisine, la veille ! Mais, Josy et Nathalie elles veulent pas ! Elles veulent plus raconter ! C’est trop pour elles ! Faut comprendre ! C’est trop dur ! Trop affreux ! La mère de Josy les coupe d’un « Dégueulasse ! » Bien senti. Presque craché ! Et puis, elle les encourage de nouveau à raconter ! Il faut qu’elles racontent ! Allez mes chéries ! Et depuis, un quart d’heure, le brigadier-chef, derrière son bureau, fini par se demander si c’est du lard ou du cochon, et un quart d’heure qu’au près de lui, le brigadier Bérecq à la gorge sèche !

 soufflez

Depuis que Fernand Gandon, ce grand corniaud dépendeur d’andouilles est entré au petit bar de l’Escale, on en sait un peut plus au comptoir qu’à la gendarmerie.

boulot

D’après lui, les petites auraient vu, auraient vu Raoul Boulard à poil ! A priori, y a aucune raison qui justifie cela, vu que le naturisme, le nudisme sont peu pratiqués au Chatelet-sur-Souilly ! Donc, l’affaire est grave !

a_poil

« Y a eu des attouchements ? » Demande une voix près du Juke-box.

« Oh ! Sûrement ! Sûrement ! » Répond une autre.

A la gendarmerie, on le sait maintenant aussi, mais le brigadier-chef veut en savoir un peu plus, rapport à son rapport. Les circonstances ! Parce que finalement, sans vouloir vexer la mère Pilorget, oui ! C’est dégueulasse ! Certes, encore qu’il n’a pas à juger en tant que brigadier-chef, mais il n’y a pas là de quoi mettre un homme, aussi déshonorable soit-il en prison ! Il doit s’armer de patience et de spycologie entre la mère Pilorget qui sort son mouchoir à tout moment et les fillettes, apeurées. C’est le brigadier qui a la solution en sortant des pastilles à la menthe, rapport à sa pépie. Il en a toujours sur lui car ça calme le manque de blanc-sec. Il en propose aux gamines, gentiment ! Et enfin, les langues se délient.

Effectivement, elles ont vu m’sieur Boulard, ce sont elles qui le disent : M’sieur Boulard tout nu à la fenêtre.

Le brigadier note. Le brigadier-chef surenchérit :

« Tout nu… Tout nu? »

Y a une des petites, Josy je crois, qui précise qu’il avait un haut ! Un haut de quoi ? La mère Pilorget Traduit :

« Un tricot de peau ! Il avait un tricot de peau en haut !» Ben oui ! En général, ça se met pas en bas !

« Ben ! Hé ! Donc, il était pas tout nu, tout nu! »

 Non ! Font les petites de la tête !

« Bon… On va pas jouer sur les mots ! » Lance la mère Pilorget.

Oui ! C’est embêtant ! Et même, y pense : « Ca fait chier ! » Le brigadier qu’avait déjà tapé « tout nu » sur son rapport, qu’est maintenant à refaire ! Avec la machine à écrire qui fait « vrrriitt ! » et qui dégueule le rapport. Le brigadier-chef prend son sourire le plus patelin :

« Mais… Mes petites filles… allez ! Nous devons bien nous entendre ! M’sieur Boulard, à moitié-nu, la mauvaise moitié nue… Il vous a parlé ? Y vous a fait des signes ?Euh… Lui-même, il avait une certaine activité ? Il avait des gestes à la fenêtre ? »

Le brigadier Bérecq manque de salive. Le bureau est plongé dans le plus grand suspense ! Derrick à la TV, à coté, c’est rien !

« Alors ? Il a fait des gestes m’sieur Boulard ? »

« Oui ! » Dit Nathalie après réflexion et après avoir levé le doigt comme en classe. « Y nous a souri ! »

Voilà une situation parfaitement dégoutante, dégueulasse, et je pèse mes mots ! Un quinquagénaire chauve, moustachu, gras du bide qui plus est, à qui tout le monde aurait donné le bon dieu sans confession qui s’exhibe le zboub à l’air et qui sourie à des gamines même pas pubères ! C’est révoltant ! Oui ! Encore que finalement, y a pas de quoi l’entraîner aux assises ! Il était chez lui, un moment d’inattention, il se changeait, il pourra raconter qu’il a été alerté par un bruit, qu’il s’est précipité à la fenêtre, non pas dans le plus simple appareil, mais avec l’appareil dépassant à peine du tricot de peau, et que, rassuré, à la vue des gamines, à défaut d’apercevoir des mécréants, il leur a souri, avant de vaquer à ses honnêtes occupations !

C’est ce qu’a dit, c’est ce qu’a expliqué le brigadier-chef, en substance, se prenant pour l’avocat du diable !

« Ah ! Ca, pour coller des prunes, des p-v à tour de bras sur les pare-brises, y-z ont pas de problèmes de conscience ! Mais pour défendre les pédophiles, ils sont pas les derniers ! »

amende

C’est ce que pense et se dit la mère Pilorget, révoltée! Et c’est vrai que c’est révoltant !

La mère Pilorget pousse les petites à trouver des détails qui permettraient d’inculper l’outrageur ! Ce salaud, ce saligot, ce pervers ! Cette enflure ! Cet enfoiré de Raoul Boulard ! Ah ! Oui ! Elle a dit ça ! Enfoiré ! Réellement ! Elle, si bien élevée ! Enfin… si maniérée, elle a dit le mot enfoiré ! Même que ça a choqué le brigadier-chef ! Pas le brigadier, plus âgé, qu’en a vu d’autres, et qui vraiment, commençait à se sentir défaillir ! Attaqué par le manque ! Le brigadier-chef à lancé :

« Mes p’tits chats ! Mes petits anges ! On n’est pas là pour vous ennuyer ! Vous êtes bien belles, bien gentilles, alors essayez de vous souvenir, sauf votre respect m’dame Pilorget… Mes petites, m’sieur Boulard… Quand il vous a souri à la fenêtre, comment dire… Sauf votre respect encore une fois, m’sieur Boulard, y vous aurait pas dit des choses ? Des mots ? Vous savez, des mots que les enfants, surtout les petites filles, ne comprennent pas toujours ! Il… Il n’était pas nerveux ? Il avait pas des gestes particuliers ? Y… Ne tremblait pas ? Sauf votre respect m’dame Pilorget… »

Devant le brigadier-chef, les petites filles étaient interdites. Non ! Pffft ? Elles ne se souvenaient pas ! D’ailleurs, elles ne disaient rien ! Plus rien ! A un moment, elles se sont regardé toutes deux et après avoir hurlé, elles se sont mises à pleurer !

Il a fallu vingt minutes pour les calmer. Tout y est passé. Chantage à la grenadine, le brigadier Bérecq qui faisait Ainsi font-font-font les petites marionnettes, la mère Pilorget qui menaçait de les inscrire au parti communiste ! A la fin, épuisées, entre deux sanglots, elles ont avoué qu’elles avaient menti ! Elles n’avaient jamais vu Raoul Boulard à la fenêtre le zoizeau à l’air en train de leur sourire ! Enfin… Pas le zoizeau ! Raoul Boulard en train de leur sourire ! On allait enfin respirer, souffler ! Oh ! A cet âge-là, y a pas d’outrage à agent ! Quand la petite Nathalie a expliqué entre deux hoquets :

« On a inventé ça parce que Mireille, la fille de Raoul Boulard, elle raconte à l’école qu’elle a vu m’sieur Pilorget, et qu’elle le voit tous les midi tout nu à sa fenêtre ! »

Elle parlait bien de m’sieur Pilorget Simon, le mari de m’dame Pilorget, présente à la gendarmerie ! Cette dernière a fait le dindon ! Elle fait bien le dindon qui écarquille les yeux, qui se rengorge ! Elle a dit :

« Mais ! Cette petite salope de Mireille Boulard, elle pouvait mentir, elle aussi ! »

« Non ! » A confirmé Josy ! D’autres enfants l’avaient vu aussi, son papa, m’sieur Pilorget, tous les midis, le petit chose et les deux orphelines en évidence ! Tous les midis à la fenêtre !

Le brigadier-chef commençait à perdre patience. Le brigadier commençait à avoir des hallucinations, rapport au manque de blanc sec !

Le brigadier-chef a tapé sur son bureau.

« Mais quelle fenêtre ? Il était à quelle fenêtre monsieur Pilorget ? Bon sang de bon soir de vache enceinte ? »

Il y a eu alors un grand silence.

Et la petite Josy a soufflé :

« La fenêtre de la maison des Boulard ! »

a_la_fenetre

C’est ainsi qu’une heure plus tard, on apprenait au petit bar de l’Escale par le brigadier enfin désaltéré qu’il y avait une liaison amoureuse et adultérine entre m’sieur Pilorget et m’sieur Boulard ! Ah ! Y a des moments historiques qui dépassent largement le secret professionnel ! Bien sûr, m’dame Pilorget n’a pas déposé plainte ! Elle a du préférer régler ça dans la sérénité et le calme du home familial ! Y a pas eu d’enquête non-plus ! Pour quoi faire ?

« C’est plus rentable de distribuer des prunes sur les pare-brises ! »

Comme dit le brigadier en entamant son troisième blanc sec ! C’est… Allez… Pas d’enquête ! C’est quand même dommage ! Pas d’enquête ! Si y en avait eu une, sous la terre battue de la grange, on découvrirait le corps d’un cousin disparu. Et dans l’atelier l’insecticide qui a servi à faire passer plus vite dans l’autre monde une vieille voisine, dont on a hérité !

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