Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Dépèches du Tarn et Saone
14 décembre 2009

Jean-Luc Boulard. 39 ans.

 

(Retranscrit de l'émission sous les étoiles exactement du 4 Décembre 2009 de Serge Le Vaillant)

Jean-Luc. Jean-Luc Boulard. 39 ans.

 

glace___la_viande

 

Vous en faites pas pour moi ! Le bilan, j’le ferai sans doute voir peut-être traditionnellement l’année prochaine ! Les 40 ans ! Vous en faites pas ! Vous en faites pas pour moi ! Moi je m’en fais pas pour vous ! J’ai mes amis, et ça me suffit ! J’en veux pas plus ! Quatre-cinq ! Ca suffit pour s’organiser quelques soirées sans se créer d’obligations. D’ailleurs, les obligations, comptez pas sur moi ! Je suis libre ! Peinard ! J’demande rien à personne ! Alors ! Me demandez rien ! De toutes façons ce sera non si vous me demandez quelque chose ! J’ai pas le temps ! J’ai autre chose à faire ! Le boulot, les loisirs, Quatre-cinq copains !

copain

D’ailleurs, avec mes copains on pense pareil ! On se retrouve à tour de rôle chez les uns, chez les autres, pour l’apéro, pour raconter des conneries !

copain_cork

Des grosses conneries ! Ah ! Mais j’ai pas honte de le dire ! Des conneries ! Pour se marrer ! Pour rigoler gentiment ! Pas de prise de tête !

 

copains

 

Parfois, on pousse l’apéro jusqu’au diner ! On enchaine ! Mais alors, attention ! A condition de ne pas mettre les petits plats dans les grands ! Faut que ce soit à la bonne franquette ! Pas de frime ni de tape-à-l’œil !

bouffe

Ah ! Le tape-à-l’œil, genre bifteck d’Autruche, ragout de bison, civet de crocodile pour épater la galerie ! Comment ? Pour essayer d’épater la galerie ! Non ! C’est pas notre genre ! Faut pas non plus que ce soit spaghettis au beurre pizza réchauffée au four ! Non ! Quand même ! Non ! Noooon ! Une petite blanquette à l’ancienne, un bœuf bourguignon, de la palette aux lentilles,

lentilles

à condition de ne pas oublier la saucisse de Morteau, sinon ça repart direct en cuisine !

saucisse

Un pot-au-feu, une potée ! Voyez ? De la… De la cuisine familiale ! De la cuisine bourgeoise, roborative, puis alors du plat unique ! Mais alors à volonté ! Qu’y ait plus de place pour le fromage ! Quoi du Moka ? Du Moka ? Non-non-non ! Apporte plutôt les bouteilles de digeo ! De digestif ! Puis alors les repas entre copains, c’est un couvert unique ! Comme ça, pas trop de vaisselle à faire pour le lendemain ! Mais oui ! C’est ça ! Apporte le rouleau d’essuie-tout pour faire des serviettes ! C’est ça l’amitié ! En tout cas, des signes extérieurs de vraie amitié ! Les copains ! Se raconter des conneries, bien bouffer, pas se prendre la tête !

 

 

Qu’est ce qu’on se raconte comme conneries ? Ben ! Des conneries ! Ben ! Qu’est ce qu’on pourrait échanger d’autre ? Vous nous imaginez ?

 

 

« T’as vu le dernier film de machin ? T’as lu le dernier roman de… »

 

 

Non mais oh ! Et pourquoi pas de la politique ? Et pourquoi pas causer des actualités ? Non ! Mais faut vraiment avoir rien à foutre et rien à se dire pour en arriver là !

 

 

« Ah ! Machin qui se prend la tête ! Et machin qui prend la tête, la présidence de tel mouvement ! »

 

 

Ben ! Qu’il la prenne ! S’il la veut, c’est que la place doit être bonne ! Puis qu’est ce qu’y va changer ? Qu’est ce qu’y va nous apporter de mieux malgré ses belles promesses ? Ah ! Qu’il nous laisse bouffer tranquilles et nous marrer !

 

 

« Et machin truc bidule ? Vous avez entendu parler de lui ? Y paraît que la justice…»

 

 

Oulala ! Oulala ! Pourquoi pas causer de foot ou de tennis ? Non ! Mais faut vraiment avoir jamais réfléchi sur le sens de la vie, sur le sens de sa vie pour s’intéresser à des bêtises pareilles ! « Ploc-ploc ! 30-15 ! » Et pourquoi pas 40-12, 30-16 ? Non ! Mais ça sert à quoi ? Et à qui ? Bon… A qui ? On le sait ! Mais ça sert à quoi ? Mais faut avoir que du vide dans son existence pour parler de ça !

 

pong

 

La vraie vie, avec les copains, se raconter des grosses conneries, puis regardez-moi ça ! Les petits légumes en fagot qui ont bouilli à point, et qui restent croquants ! Dans le bouillon de légumes dégraissé au torchon ! Ah ! Le pot-au-feu de sa mère, l’os à moelle, avec du gîte, du plat de côte, servi avec de la moutarde de Meaux et des petits cornichons, croquants eux-aussi !

potaufeu

Et puis s’il en reste demain de la viande, et ben on fera une salade de bœuf avec des oignons roses ciselés jusqu’à être transparents ! Puis une petite vinaigrette avec des échalotes et de la ciboulette ! Mmmm ! Et si y en a encore, et ben on coupera en tranches et on les fera poêler avec de la sauce tomate et des cornichons !

 

cornic

 

Vous en faites pas pour moi ! Moi, je m’en fais pas pour vous ! Ah ! Vous faites de que vous voulez hein ! Enfin… Vous faites ce que vous voulez… Ce que vous pouvez ! Vous en achetez vous de la pizza surgelée à mettre au micro-onde ou au four ? Bon appétit ! Vous avez de l’argent à perdre ! Vous avez pas de temps à perdre, mais vous avez de l’argent, du pognon à perdre ! Ou alors vous avez pas d’épouse ? De la vraie femme il s’entend ! Vous rentrez du boulot, un peu crevé, sympa… Bon ! Moins aimable que le matin mais : « Bonsoir chérie ! Tu nous sers l’apéro ? » Avec modération ! Sans grignotages entre les repas, des fois qu’on serait répréhensibles et que ces braves flics à qui nous devons tant de bonheur perpétuel, des fois que les bourres arriveraient à la maison ! Ouais ! Royco et Pullman ! Qu’y viennent vérifier ce qu’on bouffe, et qu’on déguste bien 8 fruits et légumes par jour ! Ho ! Ho ! Ho !

 

 

 

« Alors chérie, qu’est ce que tu nous a préparé pour ce soir ? Petit diner en amoureux ! Hein ? J’allume des bougies ! Alors ? Qu’est ce qu’on mange ? »

 

 

Ah ! La vache ! Ah ! La saleté ! Elle a fait une pizza ! Une pizza surgelée qu’elle a glissée dans le four ! Feignasse de bonne femme !

poche

Incapable d’aller jusque chez le boulanger, et de réclamer gentiment de la pâte à croissants ! De la pizza faite avec de la pâte à croissants ! Une bonne idée ça ! Vous m’en direz des nouvelles ! Un peu de sauce tomate, un peu de farigoulette, des olives, des anchois, mais c’est toute la Provence qui chante sa mère !

pizz

Non ! Elle préfère payer quatre fois plus chère de la crotte industrielle, usinée en laboratoire ! Feignasse ! Bonne à nib ! Et le jour où elle m’a apporté des croque-monsieur tout préparés sous plastique ? Ah ! Je l’ai mise dehors ! Ah ! La saleté ! Même pas capable de trouver de la force dans ses poignets pour beurrer du pain de mie, d’y mettre dedans de l’épaule, du gruyère ou ce qu’on veut ! Non ! Déjà, madame confondait le jambon avec n’importe quoi, et puis alors l’emmental ! L’emmental ? Non ! Du gruyère ! Du comté ! Aucun gout ! Elle n’avait aucun gout ! A tel point que je me suis demandé pourquoi et comment je l’avais séduite !

 

 

Aucun respect de la vie ! Ah ! Ca ! Pour faire du vélib’ et causer d’écologie, y avait du monde ! Mais aimer la vie, y avait plus personne !

 

grema

 

Comment qu’elle s’appelait déjà ? Ah ! Oui ! Germaine ! Germaine née Riquet ! Germaine Riquet ! C’est tout dire ! Elle avait dans les 30 et quelques, presque vierge ! Elle avait eu quelques aventures sans lendemain, au cours desquelles elle avait cru, elle, au grand amour ! C’était une sentimentale, et aussi une grande déçue du programme commun de la gauche ! Son père… Elle avait 30 ans passés… Son père lui faisait encore son linge, sa lessive ! Et y venait passer l’aspirateur dans son appart de fausse célibataire ! Qu’est ce que je suis allé m’emm… M’embêter avec ça ? Pour sa brunitude à frange ? Pour ses petits seins en poire ? Pour ses mirettes de chouette hulante ? Pour sa frimousse de Blanche Neige à la manque ? Le jour où je lui ai demandé de repasser le col d’une de mes chemises, aimablement, mais elle a failli tomber dans les vapes ! Le lendemain, j’l’ai envoyée chez le boucher pour réclamer de la queue de mouton, manière de provocation. Le type derrière son étal n’en est pas revenu et il a préféré en rire ! Elle, elle est revenue comme si elle était en deuil ! Comment s’appelait-elle ? Ah  oui ! Germaine ! Germaine Riquet ! J’ai failli oublier !

 

grema2

 

Germaine ! Elle n’avait pas beaucoup plu aux copains ! Oh ! Y me l’ont pas signifié ! Parce que ce sont des copains ! Le bras et le cœur ouvert mais… Mais faut pas faire suer ! Faut pas raconter des bêtises ! J’ai dis ! On se raconte que des grosses conneries !

 

 

Un soir, elle, elle nous avait parlé de Proust, de Chateaubriand et de « Christophe Dechavanne qui peut pas être aussi con qu’il en a l’air ! » C’est ce qu’elle disait ! « En tout cas, c’est vrai qu’il sait faire du pognon sur la connerie ! La sienne d’abord, celle des autres ensuite ! Hein ? » Elle disait cela sentencieusement ! J’ai cru entendre le couperet de la guillotine lui tomber sur le râble ! Plus que condamnée ! Condamnée sans appel ni cour de cassation ! Pas de dossier au sommier à plumer, liquidée ma pauvre ! Elle était liquidée ! Ca se voyait dans le regard des copains !

 

 

« Allez ! Apprends déjà à faire une vraie choucroute, c’est à dire en commençant par du collet fumé ! »

choucroute

 

 

Elle, elle avait compris du collier fumé ! Ah ! La-la-la-la-la-la ! Niveau coup de pompe dans le derche, non pas par mon boucher qu’est très bon et pas macho ! Ah ! La-la-la-la ! D’accord ! On peut être une bonne femme et pas savoir faire des nouilles au beurre, parce que tout de même ! Après des générations et des générations de femelles corvéables à merci, maintenant, dans ce monde merveilleux et moderne qu’est le nôtre, hein ? C’est parce qu’on est une femme qu’on doit passer sa vie devant la gazinière à faire de la… Hein ? A faire de la cuisine ! Maintenant, elles veulent une vraie vie ! Rigoler entre femmes ! Ouais ! Lire la presse people ! Faire de la barre à terre et de l’aérobic ! Ouais ! Et puis, plus se faire marcher dessus, sinon par le chef de service, qui peut, lui, tout se permettre parce qu’il peut autoriser une promotion afin de mieux de réaliser humainement !

 

 

Y avait donc Germaine. Enfin… Y a eu Germaine. J’croyais que c’était un cas ! Malheureusement, pour mes frères de sexe, je dois l’avouer, c’est un cas de moins en moins isolé !

 

 

Et puis y eu Solange ! Solange Gatinais !

deuxieme

Une merveille ! La cinquantaine qui va au tombeau en reculant au lieu de préparer son âme au néant en réglant ses angoisses d’ici bas, madame, elle, se prenait pour une demoiselle ! Elle allait presque jusqu’à jouer au bac à sable. Elle voulait pas entendre parler d’âge ! Elle subissait le diktat de la mode ! La mode qui passe et qui repasse, mais pas les caleçons ! Elle s’était fait faire des lèvres en bec de canard, tirer la peau, le visage et les fesses, elle avait des seins en plastique et des tatouages orientaux sur les reins ! Ah ! Pour le corps, son corps, elle faisait des efforts ! Elle feuilletait les magazines de femmes, mais elle ouvrait jamais un bouquin sérieux ! Tu frappais dessus… Non ! Rassurez-vous ! Ca n’est jamais arrivé ! Tu tapotais dessus, ça sonnait creux !

 

 

Et puis y a eu Rolande ! Ah ! Rolande !

rolande

27 ans, une deuxième main, hélas végétarienne ! Fruits et légumes ! Rien d’autre ! J’me suis dis : « Pourquoi pas ? » J’me suis dis : « Tiens ! Il est peut être temps que tu penses à ta ligne toi aussi ! » Oh ! Pour la santé ! Pour le cholestérol ! Ou plutôt contre le cholestérol ! Le jour maudit où elle est revenue de SuperInterHyper avec des légumes épluchés, coupés en morceaux, sous plastique, j’me suis demandé si j’étais bien de ce monde ! Même pas trouver la force dans ses poignets d’éplucher une pomme et de retirer le trognon et les pépins et de la couper en morceaux ! Ah ! Ca a pas duré longtemps avec Rolande ! Pourtant, je l’aimais bien !

 

legume

 

Mais pour moi, ce qui compte, avant l’année prochaine, où je ferai le bilan de mes quarante balais d’existence sur cette terre, c’est les copains ! Pas se prendre la tête ! Pas d’obligations ! Ah ! Ca ? Comptez pas sur moi ! J’suis libre ! Peinard ! J’demande rien à personne alors ne me demandez rien ! De toute façon ce sera non ! 4 ou 5 copains ! D’ailleurs, on pense pareil ! On se retrouve à tour de rôle, chez les uns, chez les autres, pour l’apéro, pour raconter des conneries !

se_marrer

 

 

De grosses conneries !

 

 

Mais alors, qu’est ce qu’on est bien !

 


Publicité
Commentaires
Publicité
Publicité