Est-ce que tu viens pour les vacances? (En Meurthe-et-Mayenne)

(Retranscrit de l'émission sous les étoiles exactement du 06 Février 09 de Serge Le Vaillant) Ah ! La ! La ! La ! La ! La ! La ! Voilà ! Ca commence ! Ou, plus précisément, c’est reparti ! Ca a commencé la semaine dernière quand ma mienne, Monique, a rapporté des catalogues d’agences de voyages. Depuis, plus moyen de regarder la tv tranquille, plus moyen de regarder la tv sans être interrompu ! - « Et si on allait en Grèce ? Parce que là, y a un hôtel qu’a pas l’air mal ! » - « Ou le Maroc ? C’est très à la mode le Maroc ? Et puis au moins, on est sûr d’avoir du soleil ! » Vous allez voir ! D’ici deux semaines, elle va se mettre au régime ! Oui ! Oui ! Oui ! Oui ! Oui ! Elle va ressortir les maillots de bains du fond de l’armoire, et comme y a eu les fêtes de fin d’année, la dinde farcie, les chocolats, la buche, les apéros, les digeos, les marrons glacés, et ben… les maillots… Oh ! Quelle surprise ! Ils vont être trop petits ! Et alors là ! C’est le drame ! La Grèce, le Maroc, j’sais même pas pourquoi elle en parle, vu qu’elle est prévenue ! Je ne vais plus à l’étranger ! L’étranger, c’est étrange que ce mot soit resté dans le vocabulaire malgré le politiquement correct ! On va à l’étranger, des nouvelles de l’étranger, l’étranger de Camus… Bizarre qu’un ministre nous ait pas encore pondu une petite loi qui porterait son nom ! En tout-cas, moi, personnellement, en ce qui me concerne moi-même, je ne vais pas à l’étranger ! Ou plutôt, je n’y vais plus ! La dernière fois, c’était en Tunisie. Ah ! Oui ! Là-aussi ! Bel hôtel, piscine, à vrai dire, on se serait cru n’importe-où. Voyage organisé, y avait que des français ! J’suis désolé, mais moi, j’vais pas à l’étranger pour rencontrer des français ! Et puis Hôtel-Piscine, effectivement, y a aussi ça partout chez nous ! Pas besoin de faire des milliers de kilomètres ! Même du couscous y en a de très bons en France ! Oui… Le soleil, le soleil… D’accord ! La belle affaire ! Et puis, puisqu’on se dit tout, et que je veux pas vous mentir, j’ai peur de l’avion ! Enfin… Pour être plus précis, j’ai peur en avion ! Euh ! L’avion, en lui-même, par lui-même, sur le sol, y me dérange pas ! Y me fait pas peur ! C’est à l’intérieur, en vol, conduit par un type que je ne connais même pas ! Déjà, j’monte pas en bagnole avec n’importe-qui, c’est vous dire ! Ouais, j’suis pas tranquille moi dans les airs ! D’ailleurs, j’suis pas le seul ! J’ai lu quelque part que mademoiselle Jackie Quartz, euh ! Et ben, elle ne voyage qu’en train ou en voiture ! Jamais vous ne lui ferez prendre le zinc ! C’est peut-être encore plus difficile que de faire manger de la charcuterie à madame Bardot ! C’est vous dire ! Bon… Pour la Tunisie, on n’allait pas y aller à la nage ! Alors, j’peux vous garantir que les accoudoirs de mon siège, y-z-ont souffert ! Le pire, c’est l’atterrissage ! Le pire, aussi, c’est le décollage ! Après, une fois qu’on est sur l’eau, au-dessus de la mer, on a quelques espoirs ! J’ai prié ! Ah ! J’ai prié tous les saints ! Qui m’ont d’ailleurs entendu et exaucé soit dit entre parenthèse, puisque je suis toujours des nôtres ! Hé ! Ca faisait un moment, ça faisait longtemps que j’avais pas prié ! Ca arrive parfois ! Ca arrive qu’en cas de besoin ! Quand je me sens plus près de toi notre dieu ! Sinon, on pense à autre chose ! C’est-y-pas-vrai ? Pas d’avion ! Pas d’avion ! - « Et pourquoi qu’on n’irait pas à Vierzon ? Ou à Roubaix ? » C’est moi qui pose les questions ! Elle répond pas ! Elle ne relève même pas le nez des catalogues ! Vous voyez le genre ! J’réponds pas à des bêtises pareilles ! Ah ! Elle est très comme ça Monique ! Elle est très comme ça ! Et puis surtout, elle est très soleil ! Et là, en ce moment, elle est en manque ! Elle serait la seule, on la plaindrait ! Déjà, pour elle, les vacances, ça veut dire : ne rien faire ! Encore moins qu’à la caisse d’assurance maladie qu’elle fréquente quotidiennement pour faire ses 35 heures ! Chaque fois que je vais la voir, elle est à la machine à café ! Et, elle est pas seule ! Jamais seule ! Avec les copines ! Les collègues ! Josette, Mireille… J’les connais pas toutes ! Et vous imaginez de quoi elles causent devant la machine à café pendant des heures ? De la surcharge de travail ! Oui monsieur ! Et ça vote ! Pour elle, Monique, les vacances, c’est feignasser toute la journée sur le sable, presque à poil ! Tu parles d’un plaisir ! Ah ! Oui ! Oui ! Oui ! Elle est presque nue ! Parce que madame pratique le topless ! Sauf quand elle va faire trempette ! J’sais pas pourquoi ! A l’air libre sur la plage, les seins à la vue de tous, et y en a qui se gênent pas pour reluquer ! Et puis, soudainement, pour aller dans l’eau, elle remet le soutien-gorge ! Faut pas chercher à comprendre ! Les femmes, j’vous jure ! Un été, on est allé à la Grande Motte. Elle voulait du typique ! Du sauvage ! De l’authentique ! Pas comme ces stations balnéaires qui ressemblent à la banlieue de Lyon, ou de Rennes ! Avec les mêmes embouteillages pour se rendre à SUPER-INTER-HYPER ! Et pour retrouver son F2 au septième étage ! Avec les panneaux publicitaires ! Non ! Non ! Non ! La Grande-Motte, c’est pas du tout ça ! Nous, on préfère le typique, le pittoresque, les grandes plages désertes, enfin… avec des petits recoins dans les rochers, des criques pour être peinards ! Alors… on est parti à la Grande Motte ! Et bien, vous me croirez si vous voudrez, elle était toujours pas contente ma Monique ! Madame aurait préféré Saint Trop’ ! Elle dit Saint Trop’ et quand elle a dit ça, elle a tout dit ! Surtout, elle sait pas si on dit « Saint-Tropezzz » ou « Saint-Trop-pet ». Pourquoi Saint Trop’ ? Mesdames-messieurs ? Pourquoi elle voulait aller à Saint Trop’ ? Pour côtoyer les stars ! Ah ! Apercevoir et photographier avec son portable monsieur Jean Roucas, Bernard Montiel, Richard Anthony, ou le chien de Dechavanne ! Ah ! Ca, ça serait son rêve ! Et puis reluquer les gros bateaux dans le port, les gros canots qu’on pourra jamais s’offrir ! Et rêver, quand même ! Rêver qu’ils ne naviguent jamais ! C’est émouvant non ? Surtout quand on sait qu’en quelques heures, ils dépensent autant de fioul que notre chaudière pour tout l’hiver ! Emouvant ! - « Monique ! Et si on allait en Tarn-et-Saône ? Trois semaines au vert, paraît que c’est vivifiant, humide comme région ! J’ai entendu un reportage, une nuit, à la radio ! » Elle lève toujours pas le nez de ses catalogues ! Mais elle répond : - « Et pourquoi pas en Meurthe-et-Mayenne ? » La Meurthe-et-Mayenne ! Ah ! La vache ! Ah ! Là, elle sait qu’elle touche un point sensible une vieille blessure. C’est le cas de le dire ! Parce qu’en fait, elle n’a pas plus envie que moi de retrouver sa Meurthe-et-Mayenne ! Alors-là, sincèrement, j’aime pas dire du mal, mais… Allez pas en Meurthe-et-Mayenne ! D’abord, qu’est ce qu’ils ont de plus les mecs de Meurthe-et-Mayenne ? Pourtant, faut les voir comme ils roulent des mécaniques ! D’abord, on comprend rien de ce qu’ils disent ! Mais rien ! Un accent… ! Comment vous expliquer… Déjà, y-z-ont inversé le féminin et le masculin ! Ca fait bien ! Ah ! Les pauvres gens ! Oh ! J’sais pas les imiter ! J’voudrais, j’pourrais pas ! Mais ça donne un peu : - « La veau dans la champ de la père Gandon, et dans le camionnette sur le rue du mère Thérése ! » Vous voyez le genre… Et puis, y a la prononciation ! En fait, ça donne : - « La vieau dans la champ ed’ la père Gandon, tions dans le camionnetche ed’ sur le rue ed’ du mère Thérése ! » Ah ! Faut suivre hein ! Paraît qu’on peut prendre ça en option pour le bac ! Eh ! Ils ont défilé ! Pour obtenir ça ! Ils ont renversé leurs saloperies… qu’est ce qu’ils cultivent ? Ah ! Oui ! De la Grouchère. Ah ! Y a de quoi être fier ! Ils ont tout renversé devant la préfecture. Ils en ont mis partout, ça puait ! Enfin, eux, y s’en foutent, ils sont habitués ! Et pour le coup, guère accueillants. Après quatre jours, on a préféré faire les valises ! Mais, c’était sans compter avec le destin, et avec Martin ! J’vous raconte l’affaire : Un matin, je décide d’aller visiter le musée de l’échangisme, à la Flèche-sur-Roucherie, faut bien se documenter, se cultiver et s’occuper ! A ce moment-là, je fumais encore. En allant au musée, je me gare devant un buraliste, au centre-bourg. Y avait une sorte de marché, là-bas, y te dise : « Le Foire ! C’est l’foire ! » Y avait pas de place, je me mets en double-file avec les warnings, vous voyez ! Quelques secondes, on va pas en faire une affaire d’état ! Remarquez, ceux qui font ça en général, moi, ça m’insupporte ! Mais, bon, quand il s’agit de son cas personnel, on s’autorise ce qu’on défend aux autres ! C’est-y-pas-vrai ? Oh ! Et puis zut ! Monique restait dans la voiture, en cas de soucis, elle pouvait manœuvrer ! Pas trop vite… quand on la guide, elle sait faire ! Elle m’dit : - « Fais gaffe, y a la garde-champêtre, elle va te mettre un prune ! » Ah ! Oui ! Oui ! Elle, elle est douée pour les langues Monique ! Et puis, elle s’acclimate très très très vite ! Bon, je mets mes warnings, et puis je cours chercher mes clopes, ma drogue, en cavalant ! Evidement, en arrivant dans la boutique, y avait un gus qui grattait ou qui faisait valider, j’sais pas, des tickets de loterie. Encore un qui paye pas assez d’impôts ! Donc, ça prend trois minutes, même pas. Oh ! Je piaffais d’impatience, allez… je vous vends le tout pour deux minutes et quelques. Deux minutes et quelques… s’il était intervenu, il allait pas en faire un fromage La Garde-champêtre ! Je ressors, toujours en cavalant. Je m’engouffre dans la voiture, et, en mettant ma ceinture, je constate avec suprême ravissement que j’avais pas de PV. Et, c’est à ce moment-là que je suis tombé sur Martin ! Qu’était à la place de Monique ! J’m’étais trompé de voiture ! J’étais pas le seul à m’être garé en double-file ! Martin ! J’l’ai su plus tard qu’il s’appelait Martin. J’vous explique : Un boxer ! Pas un boxeur ! Un boxer ! Oui ! Un clebs ! Ah ! Non ! Pas assez gentil pour que je dise chien ! Ah ! Ca, pour pas être gentil, il a pas été gentil ! Après un moment de stupeur mutuelle, moi ne reconnaissant pas Monique, lui ne reconnaissant pas son maître, après un moment de stupeur, il m’a sauté à la gueule ! L’oreille droite, mon oreille ! Et je pouvais pas me sauver, puisque j’avais mis la ceinture ! Quand le pépère à Youki, enfin… à Martin, est sorti lui aussi du bureau de tabac, quand il a déboulé, me surprenant dans sa voiture, croyant que j’étais en train de la voler… Oui ! Bien sûr ! Peut-être ! Même avec le chien ! Ah ! Il m’a mis une droite ! Ou deux, je sais plus ! Ah ! Attaqué de tous cotés ! Lui sur l’oreille gauche, son clebs sur l’oreille droite ! Ah ! J’étais beau ! Ah ! De belles vacances en vérité ! Deux jours à l’hôpital ! Bon… que les oreilles de marquées ! Une chance dans mon malheur ! Avec les cheveux par-dessus… Une chance ! Et la garde-champêtre, comme d’hab’, quand on a besoin d’eux… - « Elle essayait ed’ voler mon voiture ma adjudant ! » Qu’il disait le mec ! - Un jour, vous viendrez à la maison, j’vous ferais lire le procès-verbal ! Ca vaut quelque-chose. Non ! Non ! Non ! Non ! Plus jamais en Meurthe-et-Mayenne ! Plus jamais ! Et l’autre là ? Le nez dans ses catalogues ! Durant des semaines, elle va interrompre les programmes de la TV, elle va me faire des propositions, bon… Ca va quand même l’occuper un peu… Et puis y a le régime ! Enfin, moi, elle est prévenue ! Pas d’avion ! Pas en Meurthe-et-Mayenne ! Pas à l’étranger ! Du typique ! De l’authentique ! Du sauvage ! Ouais ! Y a son régime ! Elle va peut-être pas y arriver ! Elle va peut-être pas y arriver cette année ! J’suis vache ! Mais en fait, je l’aime ! Moi, ma Monique, plus y en a sur la terre, plus je suis content ! Pas d’avion ! Pas à l’étranger ! Du sauvage ! Du typique ! Pas en Meurthe-et-Mayenne ! J’vais y arriver ! Cette année, si elle rentre pas dans ses maillots de bain, j’vais y arriver ! On va y aller à Cap D’Agde !